Les clients n’ont besoin de rien !

La semaine dernière, j’ai été sollicité au téléphone par des vendeurs, et à trois reprises, pour me vendre des fenêtres, puis au sujet de mon CPF, et enfin à m’inviter à changer de fournisseur d’électricité.

Non, non, merci, je n’ai besoin de rien, ai-je dit. Pas de chance …

Il faut dire que les entreprises chassent les opportunités, en anglais les « leads ». 

Logique, si nous partons du postulat qu’il existe forcément sur leur marché des projets d’achat. 

Le tout est de les trouver…

Et, là, ça se complique !

Car les probabilités qu’un prospect ait un besoin, précisément au moment où il est approché par un vendeur, sont minces, et ce de plus en plus … 

C’est que le client a bien changé. 

Autrefois (il n’y a pas si longtemps), il attendait sagement le « passage d’un représentant » pour être informé, conseillé, connaître les nouveautés et les tarifs. 

Aujourd’hui, grâce à internet, il est au moins aussi bien informé que le commercial sur les produits et solutions disponibles ; au moment du premier contact, 78% des acheteurs ont « en grande partie » ou « complètement » défini leurs besoins, selon une étude menée en 2023 auprès de 900 acheteurs (B2B 6sense Buyer Experience Report). Et 84 % des acheteurs déclarent que le premier commercial qu’ils ont contacté a finalement remporté le marché. 

Mais du côté des méthodes de vente, tout se passe comme si rien ne changeait.

On continue à penser que la découverte du besoin est le point de départ incontournable d’une bonne vente, et même à préconiser de réaliser un « entretien de découverte ». Quelle valeur ajoutée au juste pour le client ? Malheureusement aucune.

La découverte est évidemment nécessaire. Mais dans la pratique, est centrée sur le « quoi », les critères d’achat et préférences de son interlocuteur, rarement sur le « pourquoi », c’est-à-dire les enjeux et préoccupations (les fameux « pains » dont parlent les auteurs anglo-saxons). 

Ce n’est pas faute de répéter aux commerciaux qu’il faut pratiquer l’écoute active, poser des questions ouvertes, etc … Rien à faire !

Car souvent, il y a dans les entreprises une division du travail : le marketing permet de capter des leads, et les commerciaux les traitent. Dans cette configuration, reconnaissons qu’il est difficile pour les commerciaux d’aborder le « pourquoi », face à des clients pressés et sachant déjà ce qu’ils veulent. Il est trop tard pour suivre les préceptes de la « vente consultative ».

Mais revenons à la prospection. La vraie. Pas le « traitement des leads ».

Elle ne peut plus se faire sur le terrain des besoins, bataille coûteuse, et presque perdue d’avance si le commercial n’est pas le premier sur l’affaire.

Le terrain à conquérir est celui des enjeux. Terrain immense et inexploré par les commerciaux, mais dans lequel se situent tous les clients avant de choisir un type de solution (ou quelquefois de laisser un problème sans réponse), puis de spécifier leur cahier des charges et enfin de consulter un fournisseur. 

Pour y parvenir, un grand nombre d’entreprises ont déjà abandonné le modèle transactionnel (fondé sur les besoins), et sont passées au mode solutions (fondé sur les enjeux). Et si la vente de solutions technologiques et/ou complexes s’y prête, d’excellents résultats ont également été enregistrés dans la vente de produits apparemment banalisés. 

C’est une question de volonté.

La façon de vendre est au moins tout aussi importante que ce que l’on vend, et source d’avantage concurrentiel.


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